DRAME : Le maître d’oeuvre a reconnu sa faute et pointé le rôle de son conducteur de travaux, ainsi que de la société de construction.
Au bout de cinq heures d’audition, l’architecte de l’immeuble dont un balcon s’était effondré en 2016 à Angers, provoquant la mort de quatre étudiants, a fini par reconnaître une « part de responsabilité » mercredi devant le tribunal judiciaire.
Le maître d’œuvre de 66 ans, Frédéric Rolland, a finalement avoué que son cabinet « portait une faute » dans le drame, tout en pointant le rôle de son conducteur de travaux ainsi que de la société de construction.
Des nouveaux plans jamais approuvés
Lors de l’audience, l’architecte a expliqué qu’il n’était « pas intervenu ni sur la conception, ni sur le dessin, ni allé sur le chantier, à aucun stade de la réalisation de ce projet » entre 1997 et 1998.
Les travaux avaient été menés par la société Bonnel sans respecter les plans de l’ingénieur béton, conçus pour des balcons préfabriqués et non pour des balcons coulés sur place, et sans que de nouveaux plans soient approuvés, ni réclamés, par le cabinet Rolland. « On a fait quelque chose qui aurait pu être bien fait. Mais où sont les plans ? Je veux comprendre ce qu’il s’est passé, techniquement », a affirmé Frédéric Rolland, veste de costume bleu sombre, pull assorti et chemise blanche.
Cinq prévenus jugés pour homicides involontaires
Le conducteur de travaux de l’agence dirigée par M. Rolland ne pouvait quant à lui « pas ignorer ce changement », a expliqué le prévenu, sous les soupirs d’une quarantaine de parties civiles. « Mais dans son compte-rendu de chantier, il ne dit pas qu’il attend de nouveaux plans. Et c’est ça le drame », a ajouté l’architecte, pointant une « erreur technique évidente ».
Comme lui, cinq prévenus sont jugés pour homicides et blessures involontaires après l’effondrement d’un balcon en octobre 2016, qui avait fait basculer 18 jeunes dans le vide. Frédéric Rolland est poursuivi pour son contrôle déficient du chantier en sa qualité de maître d’œuvre, à une époque où il était occupé par la création d’un cabinet à Shanghai.
« Faute »
Il a reconnu mercredi que la modification du mode de construction des balcons n’avait fait l’objet d’aucun avenant au contrat passé entre son agence et l’entreprise de gros œuvre. « Cette modification n’engageait aucun surcoût ni aucune modification architecturale du projet », a justifié le maître d’œuvre.
La présidente l’a par ailleurs longuement interrogé sur la manière dont remontaient au sein de son agence les informations sur les chantiers en cours. « Pour le surcoût, je savais qu’il y avait un contrat mais je n’en connaissais pas la teneur. Et s’il y avait un problème important, pas un détail architectural, ça pouvait me revenir », a répondu M. Rolland, ajoutant qu’il n’avait jamais été consulté sur ce projet. Face à Me Brouin, avocat des parties civiles, il a cependant assuré qu’il était à l’époque « complètement accessible » à ses collaborateurs.
Après le conducteur des travaux, l’architecte reconnaît une « faute »
Durant l’instruction, l’un des prévenus, le conducteur de travaux de la société Bonnel, avait expliqué que le changement de mode de construction des balcons avait permis de gagner 14 semaines sur le calendrier des travaux. Entendus la semaine dernière, les experts avaient listé toute une série de malfaçons dans la construction des balcons, évoquant même « une forme de bricolage ». « J’ai eu honte du travail de mes équipes », avait reconnu mardi à la barre le patron de l’entreprise de construction, Patrick Bonnel, en reconnaissant « une faute grave ».
Mercredi, l’architecte a reconnu à son tour la « faute » de son cabinet, ajoutant immédiatement : « Je reconnais que si je remontais le temps, la personne qui était en charge de ce dossier aurait une sanction grave. Je n’aurais pas permis ce drame épouvantable. » Le procès doit se terminer le 4 mars.