IMMOBILIER Il est désormais interdit de louer un logement énergivore affichant un diagnostic de performance énergétique (DPE) dépassant 450 kWh/an.
Une mesure à la fois écologique et économique. Depuis dimanche dernier, les pires passoires thermiques sont interdites à la location en France métropolitaine. Une mesure qui concerne des logements classés G+ au titre diagnostic de performance énergétique (DPE), c’est-à-dire ceux qui consomment plus de 450 kilowattheures par mètre carré par an. Suivront, en 2025, l’ensemble des logements G de métropole, puis les F en 2028 et les E en 2034.
Cette règle s’applique aux nouveaux baux de location signés à partir de 2023. Les locataires en place ne verront pas leur logement rénové, sauf si le propriétaire décide d’anticiper ces futurs devoirs. « Mais l’obligation d’avoir fait les travaux s’appliquera progressivement aux baux en cours », explique Louis du Merle, directeur juridique de l’Agence nationale pour l’information sur le logement (Anil). Analyse les conséquences de cette mesure sur le marché de l’immobilier.
Les propriétaires de tous les logements G+ vont-ils tous faire des travaux de rénovation énergétiques cette année ?
Non, tout d’abord parce que certains ont anticipé les nouvelles règles. Ensuite, parce que la loi prévoit des dérogations, notamment si le logement est soumis à̀ des contraintes architecturales ou patrimoniales et que les travaux de rénovation énergétique ne sont pas compatibles avec ces caractéristiques. Autre cas : si le chantier implique d’intervenir sur les parties communes et que la copropriété l’a refusé.
Ensuite, tous les propriétaires de ce type de logement n’ont pas forcément les moyens de réaliser ces travaux. Changer les fenêtres ou la chaudière, isoler les murs… peut rapidement faire grimper la facture. « Certaines aides sont à leur disposition, comme MaPrimeRénov’, l’écoprêt à taux zéro, les aides des collectivités à la rénovation énergétique… », souligne Louis du Merle. Par ailleurs, « les entreprises du bâtiment sont débordées et les prix des matériaux ont beaucoup augmenté », constate Guillaume Martinaud, président du réseau Orpi. Quoi qu’il en soit, selon Louis du Merle, « cette disposition législative envoie un signal fort à tous les propriétaires-bailleurs sur la nécessité d’engager ces travaux. Et elle pousse les locataires à se montrer plus vigilants par rapport à la performance énergétique des logements. »
Y aura-t-il beaucoup moins d’appartements à louer dès cette année ?
Dans une étude datant de juillet dernier, l’Observatoire national de la rénovation énergétique (ONRE), estime « qu’il y aurait 140.000 logements très énergivores (consommation supérieure à 450kWh/m²) dans le parc locatif privé, 50.000 dans le parc locatif social et 320.000 parmi les logements occupés par leurs propriétaires. Pour l’instant, les chiffres laissent entrevoir un impact limité sur le marché de la location, selon Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé-Pierre : « Cela devrait concerner 35.000 logements cette année, soit un quart du parc, car un locataire change d’appartement en moyenne tous les 4 ans. » Reste que certains propriétaires retireront leurs biens du marché. « Ils n’ont pas toujours anticipé la mesure ou n’ont pas les moyens de faire les travaux cette année. Ils se tourneront vers la location touristique de courte durée ou mettront leur bien en vente », prévoit Guillaume Martinaud, président du réseau Orpi. D’autres, plus rares, continueront à louer leur bien, sans passer par des agences immobilières, quitte à se mettre hors la loi, anticipe Manuel Domergue : « Ils spéculeront sur le fait que les locataires ne sont pas au courant de cette interdiction de location ou ne veulent pas faire de recours en saisissant la commission départementale de conciliation des litiges locatifs ou le juge, car ils ne comptent pas rester longtemps dans le logement. »
Y aura-t-il plus d’appartements de type G+ en vente ?
Oui et c’est déjà le cas. Dans leur bilan 2022, les notaires de France constatent une augmentation notable des volumes de vente des logements de catégorie G. Ces derniers représentent 7 % des transactions effectuées au troisième trimestre 2022 contre 3 % un an plus tôt. Un constat que fait aussi Guillaume Martinaud : « Depuis le milieu de l’année 2022, nous avons plus de logements de ce type dans le portefeuille. Et comme ils sont de 10 à 15 % moins chers que les autres biens dans le même périmètre, ils séduisent les primo-accédants. » Une tendance qui va se prolonger ?